jeudi 24 février 2011

Musc Ravageur, Frédéric Malle - Fauteur de Trouble.

 Par Phoebus.



Je pourrais vous parler du Dr Marié et de sa secrétaire Ultrasexy. Je pourrais vous dire qu'après des sous-entendus à peine déguisés, des œillades langoureuses et des respirations difficiles, c'est finalement le parfum de la Secrétaire Ultrasexy qui a poussé le Dr Marié à la faute (et le parfum en question serait Musc Ravageur, vous pensez bien).

Mais non. 

 

Déjà parce que c'est à peu de choses près le résumé du feuilleton romantique (en Espagnol sous-titré Français) que ma voisine regarde actuellement si fort que ça traverse les murs (Shhhhhh...Puede llamarme Sergio, Magdalena...). Et puis aussi parce que bizarrement, même si c'est un peu le scénario auquel on s'attend avant de sentir Musc Ravageur, eh bien c'est à des kilomètres de l'effet qu'il me fait en réalité. Bon, je vous l'accorde, je me préparais bien évidemment à être troublé, car c'est le qualificatif qui revient le plus souvent chez ceux qui ont vécu l'expérience Musc Ravageur. Beaucoup parlent de "femme nue", "d'odeur de peau"... Moi, ces qualificatifs, je les concède volontiers à Mitsouko ou aux notes de fond de Lolita Lempicka premier parfum (qui n'ont aucun rapport entre eux, certes, mais on se forge tous une définition personnelle de ce que peut sentir la peau dans les notes d'un parfum). Un snif, deux snifs, et non, toujours pas de poitrine à l'horizon. Troisième snif et aah... Ca y est, je suis troublé.




Hé oui, comment ne pas être perturbé quand on sent sur une mouillette quelque chose qui se rapproche étrangement du chien tout propre qui sort tout juste de chez le toiletteur ? (perturbé dans le sens étonné, hein, n'allez pas penser que je me laisse aller à la zoophilie entre la rédaction de deux articles). Ca peut paraitre péjoratif comme ça, mais en fait non, pas du tout... C'est juste que je ne me l'explique pas. J'ai beau adorer la cannelle, beaucoup cuisiner avec, consommer énormément de bougies parfumées à la cannelle et même avoir essayé le sorbet à la cannelle (qui se révèle être écœurant, croyez moi, n'essayez jamais), bref j'avais beaucoup de références sur le sujet et pourtant non, c'est le chien de ma grand mère, snoopy, qui s'impose à moi, snoopy qui sentait vaguement la cannelle à cause du shampooing du toiletteur, la cannelle qui se mêlait à l'odeur du poil de chien tout chaud et qui avait un rendu particulier, un peu fauve. Ce rendu particulier, je le retrouve dans les notes de têtes de musc ravageur, et on est d'accord, c'est loin d'être sexy. Mais c'est loin de sentir mauvais..!



Donc voila, moi qui m'attendais à un véritable cabaret, genre classe et glamour, je me retrouve avec du burlesque. Et la suite est tout aussi farfelue : la cannelle et le rhum des notes de têtes se dissipent peu à peu pour laisser place à quelque chose d'insondable, de saturé, oserais-je dire de granuleux ? L'image qui me vient, qui me percute, qui me sert le cœur même, est celle d'un énorme paquet de Curly, vous savez, ces biscuits apéros au maïs et à la cacahuète, à tomber par terre. C'est là dedans que je me réfugie quand j'ai des problèmes de cœur ( Oh, Sergiooo ! Se lamente la femme du docteur Marié derrière le mur, elle a sans doute découvert le pot-aux-roses). Je connais plus que bien l'odeur sucrée-salée, riche et saturée de ces petits biscuits apéritifs (si t'as plus de petite amie, prend un curly). Les notes de cœur de Musc Ravageur se résument donc essentiellement à cet aspect très poudré, sucré, sourd et grinçant, mais déjà avec ce côté ambré/vanillé des notes de fond, qui prennent le temps de s'installer...




Et enfin on y arrive. Jusque là, je ne m'expliquais pas le nom du parfum (qui est somme toute bien plus épicé/ambré que musqué), mais sur la fin, oui, on parvient à détecter ce musc un peu spécial...Et on comprend le qualificatif "ravageur" qui lui a été associé ! On constate aussi que l'aspect "fauve", qui miroitait déjà dans les notes de tête, vient faire son grand retour avant le baisser de rideau. Le côté grinçant-curly des notes de cœur s'évapore pour laisser place à un nuage de douceur et de chantilly. Oui, de chantilly, de chantilly maison montée au batteur avec un soupçon de sucre vanillé... Je ne sais pas vous mais j'adore cette odeur (sans oublier le fait qu'on pourrait mourir de plaisir rien qu'en chapardant une lichette de chantilly du bout de l'index à même le saladier...). 

 

Après l'avoir apprivoisé sur plusieurs semaines, une question se pose, toutefois, et je n'arrive pas à y répondre. Peut-on qualifier Musc Ravageur d'opulent ? Les notes de têtes sont détonantes, oui, mais le pouvoir de diffusion du parfum décroit de manière exponentielle je trouve (ça, ou alors c'est moi qui "m'habitue" à l'odeur, tout simplement, je ne saurais le dire). Il devient rapidement un "parfum de peau", dans le sens "proche de la peau", cette fois ci, et non pas évocateur de la peau, même si la tenue est excellente : une journée facile... et nos vêtements sentent encore bon la chantilly le lendemain !

dimanche 20 février 2011

Papy fait de la Résistance !


Dentier, ok. Mots-croisés, ok. Déambulateur, ok. Chevalets de Scrabble, ok.
Plus dangereux qu'une gamine douchée à Miss Dior Chérie, plus cruels que la belle-mère de Cendrillon et plus psychopathes que les dangereuses profilers de l'ombre, aujourd'hui, nos vedettes mises à l'honneur sont les papys !

Derrière ces silhouettes lascives se profilent de dangereux olfactives-killers. Nos enquêteurs se sont dangereusement aventurés dans les méandres de la société secrète la plus étendue au monde, et ce pour votre protection. Vous ne verrez plus le voisin du 4ème comme avant.

Leur arme ? Leur parfum. Petit tour de ces bon vieux sent-bons, qui se révèlent être de vrais... Armes de Scrabbelisation Massives.

Premier Spécimen : Papy Ermite

Carl Fredricksen - Là-Haut
On le dit associable, lunatique, limite méchant. Eh eh... faut pas croire, mais lorsque Monsieur, pendant la pause publicité avant les "Duels" des Chiffres & Des Lettres, va, nonchalamment vers sa salle de bain, ce n'est pas pour vérifier si "vieillard" est un mot de 9 lettres. Oh non ! Vicieusement et marmonnant tout seul, il entrouvre avec délicatesse son Eau de Cologne... Le grincement métallique du capot qui se retire le fait sourire pernicieusement. Il plisse ses lèvres et révèle une cavité, sans dents. Il fait couler l'eau de cologne sur mains, et l'applique avec précision et habitude sur son cou.
Dans ses yeux, on peut lire sa pensée la plus dangereuse : "Le compte est bon".

Deuxième Spécimen : Papy Erudit

Elder Gutknecht - Les Noces Funèbres
Le papy à la bibliothèque qui nous a tous fait rêver. Petite paire de lunette en demi-lune sur le bout du nez, cardigan à motif écossais et petite paire de mocassins taupes, en soit il est plutôt reconnaissable. C'est lui qui nous racontait pleins d'histoires quand nous étions petit. Il nous disait qu'il était journaliste, qu'il était résistant, qu'il avait connu Jean Moulin. Véritable musée à lui tout seul, il interrompt toujours ses histoires à leurs paroxysmes, en regardant sur une montre à gousset dorée deux petites aiguilles, synonymes de notre coucher. Son parfum raconte l'histoire lui aussi : Mouchoir de Monsieur. Mari de Jicky, ce parfum est une légende vivante. Tout comme Papy Erudit, il semble avoir tout vécu, et ne cessera de nous évoquer la sagesse ! Papy remonte ses lunettes sur le bout de son nez, et continue son histoire... montant cependant dans sa tête les plans les plus diaboliques pour la Résistance actuelle.


Troisième Spécimen : Papy... Papy !

Les monte-escalier Stannah
Sponsorisé par Les Monte-Escalier Stannah et Saint Hubert Oméga 3, il est...fade. Rien ne dépasse, tout est parfait. Il a un petit pavillon, des nains de jardins, un pendule en bois dans un salon qui hume l'odeur de la cire. Il ne hausse jamais la voix, et aide Mamie à faire ses gâteaux, et en souriant en plus. Il regrette un peu le temps passé, mais ne le dit pas tout le temps non plus.  Nooooon... Il écoute Nostalgie H24 pour exprimer son désarroi. Son parfum, ça fait 50 ans qu'il a le même. Il sent bon, il est frais puis il a la classe, "l'élégance raffinée" dira-t-il. Son petit atout "petit coquin rebelle et jeune" ? Il en remet deux pschit après la douche, entre Question Pour Un Champion et Le Magasine de la Santé. Houla la, grand rebelle éternel !


Quatrième Spécimen : Papy Bougon
Raymond - Scènes de Ménage

Sa femme, les voisins, les courses, la France et les Français, tout l'énerve. Sa spécialité ? Râler. Et dire que tout était mieux avant. Aaah... les années 1900 ! Pas de produits chimiques, et bigre ! Pas d'Internet pervertisseur de jeunesse. Il a sa place dans la Résistance. A vrai dire, c'est un peu lui qui commandite toutes ces attaques de Scrabbelisation Massive. D'ailleurs, en parlant de Scrabble... rien ne va plus ! Comment ça on tolère certains mots anglais ? Diantre ! Olfactivement, Papy Bougon a opté pour English Fern, de Penhaligon's, parce que "ça au moins c'est du vrai parfum masculin". Propre, élégant, légèrement vieillot, tout porte à croire que Papy Bougon a une autre raison de porter ce parfum. Oh, mais attendez, qu'est ce qu'il pourrait bien se cacher sous ce petit noeud ? 


Cinquième Spécimen : Papy Fraicheur


Georges Hautecourt - Les Aristochats
En vrai, c'est Papy Fresheur, c'est Papy Hype ! Il a facebook, un iPhone avec l'application qui permet de tricher pour ses parties de Scrabble. Il a 3 paires de Converse, et il met quelques jeans slims. Puis alors il déconne tout le temps ! Et quel dragueur invétéré, ah la la petit filou ! Les grandes dames toutes de fourrure vêtues, les plus jeunes, toutes de... non, pas vêtues. Et en plus de cela, Papy Fresh reste séduisant. Son ultime secret ? Géranium Pour Monsieur, de Dominique Ropion aux Editions de Parfums Frédéric Malle : une fougère, oui, je suis un papy quand même, mais Ô combien étudiée, très fresh, et avec en plus une couleur qui rappelle ses lunettes ;). Il est connu de nos services pour être l'homme de main pour les affaires informatiques. Et oui, son téléphone de bureau a de grosses touches.

mercredi 16 février 2011

Azzaro Pour Homme - When the Night Falls

Avant toute chose, l'article qui suit à été écrit de manière à ce que la lecture et la musique concordent parfaitement ! Normalement, à chaque"♬ When The Night Falls ♬", vous entendrez ce petit refrain ^^. Puis pour la promo, Chromeo est un groupe québécois, qui chante ici une chanson à prendre bien évidemment au second degré... Bon, c'est pas forcément mon style de musique, mais là pour le coup, je trouvais que ça collait pas mal à l'ambiance !




 When The Night Falls 

" Nan mais tu peux pas comprendre ! T'sais, la vie c'est comme le dance floor, soit tu es sur la piste, soit t'es au bar".

Merci pour cette précision Azzaro Pour Homme.
On croise énormément de gens... étranges dans une boite de nuit. Bon, déjà, la cacophonie ambiante est... particulière. Les lumières, les cris, les corps qui transpirent et.... les gros séducteurs machos !!! Manque de bol, cette fois, je suis tombé sur Azzaro Pour Homme, dit Zozo, persuadé que je serais un agréable "compagnon de chasse" pour cette "pure soirée pleine de gonzesses". C'est drôle, j'étais persuadé qu'il allait dire femelle. Comme quoi. Il ne faut jamais juger les gens à première vue. Mais avec Azzaro Pour Homme, difficile de ne pas me comprendre.

Chemise jaune ouverte à l'infinie sur un torse poilu à faire fuir le plus puissant des parfums fourrures, sourire émail-diamant, avec une bouche perpétuellement en petit pli sur le côté. Tels sont les les attributs du macho macho man ! Et en parlant d'attribut, Azzaro Pour Homme n'aura que pour seul sujet de conversation son attribut à lui... Romantisme, préciosité et bon goût pour vous servir ! Un homme, un vrai, au service de ces dames !

Il descend, d'une démarche "aérienne", du tabouret du bar et dans un geste équivoque (une rotation du bassin et un balancement symétrique d'avant vers l'arrière de ses deux bras, et ce plusieurs fois), il balance dans la foule en délire le fameux "Wouhouuuuuu !!!" que toute personne grise croit bon de crier lorsqu'elle veut danser. Ses pas "glissent souplement" sur le dance-floor, sa silhouette se fond dans la masse, au côté d'une charmante apparition blonde platine et délicatement... orangée. Zozo lève les bras haut dans le ciel, signe de sa virilité la plus intense, et...

 When The Night Falls 


L'ambiance est à son paroxysme ! Les blondes insipides font bouger leurs cheveux de sorte à ce que "les acides de fruit aillent bien jusqu'aux pointes, comme dans la pub", les petits étudiants tout foufous se trémoussent tout en "harmonie", et les odeurs commencent ! Wouhou ! C'est bien connu, l'humidité fait ressortir le parfum. Là, ça loupe pas. Azzaro Pour Homme, par son torse poilu ruisselant de bonne sécrétion masculine, nous fait partager toute sa joie ! Oooh... c'est bon coco, c'est pas "Je vous souhaite tout le bonheur du monde" qui passe !

Ah ça y est, je le vois qui commence sa danse ridicule avec l'autre blondasse... Oui, ce petit balancement en aller et retour du bras au niveau de l'entrejambe très équivoque ne me laisse aucun doute sur la nature de la chorégraphie. Je passe ma main sur mon visage, de manière désespérée ! Oh la la... Mais comment c'est possible ? Regarde moi ça ! Ils se rapprochent, quand la gente damoiselle respire l'arôme délicat de sa bouche. Une petite fraicheur pseudo-aguicheuse. Comprendre : Zozo s'est arrosé la cavité buccale de cette immondice synthétique en pschitt à pulvériser, "pour l'haleine".

Il y a toujours des moments de honte, où à une question bien embarrassante, tu as juste envie de répondre "Sorry don't speak french" et de partir avec un sourire cruche... Disons que là, quand j'ai vu la silhouette d'Encre Noire, sa petite chemise bleue à motif léger, délicatement ouverte sur un décolleté simple et masculin, j'avais envie de ne plus exister, face à Azzaro Pour Homme qui m'a, dans sa plus grande bonté, jeté sa chemise jaune sur la tête. Nan mais c'est pas vrai. Je voulais juste me faire un ami quoi !!! Puis voila que l'autre brêle revient au bar, torse nu, complètement ivre d'énergie et suant tel... non, mieux vaut éviter la comparaison.

 When The Night Falls 



Il m'enlace dans ses bras saillants, me présentant son "coup du soir", Jade, élue Miss J'Adore de la soirée. Je souris "niaiseusement" aux deux tourtereaux, pendant que j'essaye avec mes pieds de reculer discrètement d'eux mon tabouret en plastique rouge transparent, tentant de faire le moins de bruit possible, dans ma paranoïa la plus intense. Gros moment de suspens pour moi. Mais, béni des dieux que je suis, la musique entre dans un rythme électro interminable, m'enlevant, à mon grand dam, mes deux chéris. Je pousse un "Ouf" de soulagement. Encre Noire rigole alors subtilement dans mon oreille.
" - Je vois que tu as fait la connaissance de Zozo...
  - Si tu savais, je crois que je suis au bord du suicide !!! je rétorque, effectivement au bord du suicide.
  - Et encore, t'es qu'au début là, je t'évite la partie "je m'exhibe devant la totalité de la boite"
  - T'es sérieux là ?
 - Azzaro Pour Homme, où l'art tout en finesse de montrer à la face du monde que oui, il a des couilles" conclut Encre Noire, dans une parole prophétique, sous forme d'adage à graver sur une plaque de marbre, dont on installera une copie sur chaque sanctuaire du parfum !

 When The Night Falls 

L'épilogue de cette belle soirée dresse un tableau plutôt réussi. Encre Noire et moi, devant une petite boisson citronnée toute simple, passons le reste du temps à parler, en bons amateurs du Muppets Show, sur les deux amoureux d'un soir, ainsi que sur les quelques autres spécimens se trémoussant.

Pour la petite histoire, la chemise jaune jonche toujours le pied du bar où elle est tombée...

vendredi 11 février 2011

Ck One - Teenage Dream.

 Par Phoebus.


Les rares fois où j'entre dans un Séphora pour réellement acheter un parfum (c'est plus rare qu'une éclipse de lune mais ça arrive) – et non pas faire semblant de flanner dans les allées pour me parfumer en cachette de la dernière variation de Shalimar...Je suis toujours curieux de voir quels échantillons la vendeuse va me donner, tout sourire, avec le sachet contenant mon achat. De la pub gratuite, une manière de dire "en fait, moi je vous aurais plutôt vu porter ce parfum là, donc la prochaine fois peut-être, si ça vous plait ?". Je prends ça un peu comme les tests de personnalité bidons qu'on trouve dans les magazines people, vous savez, dix questions, trois réponses TRES stéréotypées, et donc trois verdicts super antagonistes qui vont changer à tout jamais votre vision des choses (majorité de triangles, vous êtes joyeux, triste, sexy et réservé). Les caissières Sephora, ces profilers de l'ombre donc, distribuent à tour de bras les échantillons des parfums les plus bankables après avoir subtilement analysé le client et lui avoir collé une étiquette de public cible. Gniark gniark, s'ils savaient, je suis peut-être blonde platine, mais derrière mon fond de teint orange foncé se cache un monstre de manipulation maitrisant parfaitement l'art de la psychologie. Une gamine qui achète Lolita Lempicka premier parfum ? Et Hop, deux échantillons de Nina et elle ne saura plus où donner de la pomme. Un Jacky poivre-sel qui sort son pouvoir d'achat de sa pochette-banane en cuir pour acheter une énième Eau Sauvage ? Et Hop, un échantillon de Cool Water de Davidoff, il reviendra dans deux mois divorcé, les cheveux teints et habillé comme un ado. Une vieille bourgeoise qui vient acheter son extrait de Shalimar, comme chaque premier mercredi du mois ? Et Hop, cinq échantillons de Shalimar avec le sachet (pourquoi arrêter de traire quand la vache a encore du lait...?). Devant moi, ce jour là, une femme très souriante, habillée en noir, la cinquantaine environ, repartait avec son flacon de Chanel N*19 et toute une batterie d'échantillons de Balenciaga. Veinarde ! Je serrais mon flacon de Lolita Lempicka au Masculin en me demandant ce que moi j'aurai, ce coup-ci. La première fois, j'ai eu droit à Play de Givenchy, un échantillon du noir et un échantillon du blanc. C'était à mourir d'ennui, je me suis endormit avant d'atteindre les notes de cœur (le pire c'est que c'est vrai, mais faut dire que je les avais essayé avant d'aller me coucher). La deuxième fois on m'a refilé Guerlain Homme, et franchement : *BiiiiiiiiiiiiiiiiiiiP*... ah, mince, je ne peux pas dire ce que j'en pense réellement car le co-hôte de ce blog a censuré mes propos. Pour finir, la dernière fois j'ai eu droit à...Attention, accrochez-vous à vos claviers, femmes enceintes et personnes cardiaques s'abstenir : Trois échantillons de One Million. TROIS. Que j'ai ressortis du sachet pour les poser sur le comptoir avant de tourner les talons en remerciant vaguement la vendeuse sans la regarder. 


Oui, vous avez deviné, cette satyre sociale illustrée a été prise sur le blog de Pénélope Bagieu, (jetez-y un œil, cette fille a une vie tout à fait...fascinante !).
  

Ce jour-ci donc, je misais tout sur la caissière pas trop simplette qui avait donné du Balanciaga à la cliente précédente. Et j'ai eu raison de croire en son sourire honnête, aux dents un peu de travers, car tout au fond du sachet se trouvait un petit vaporisateur blanc. Coincé dans son pliage en carton blanc lui aussi, il y avait sobrement marqué Ck one. Je ne me doutais pas encore que j'allais avoir un gros coup de cœur (donc spéciale dédicace à ladite-vendeuse qui ne se reconnaitra pas : je vous remercie mille fois !). Pour tout vous dire, sur le coup, je n'étais vraiment pas content car pour moi Calvin Klein représentait la pire marque de parfum qu'on peut trouver dans le mainstream (même si le niveau remonte un peu aujourd'hui grâce à Beauty). Je connaissais l'insipide Ckfree, l'instable Ckin2U, l'insupportable Obsession... Ck one je le connaissais de nom, jamais sentit, et pourtant je le détestais d'emblée. Ce n'est que, quoi, allez, deux semaines plus tard que je me suis rendu compte que je ne savais pas du tout ce qu'il sentait exactement. Et c'est sur un coup de tête que j'ai sortis l'échantillon de ma table de nuit pour m'en parfumer juste avant d'aller au sport, un soir, parce que de toute manière personne ne fait attention à ce que tu sens dans un Gymnase (l'air ambiant est tellement poussiéreux et saturé qu'il vaut mieux mettre ses narines en mode off pour survivre). 

 

Pendant l'échauffement, alors que je bougeais les bras dans tous les sens, j'étais enveloppé par Ck one et force m'était de constater qu'il était loin de sentir mauvais... Un peu de citron, un peu de jasmin, un peu de thé, un peu de...De quoi ? De coton ? Ça sent le coton. Mais j'étais vraiment de mauvaise fois, petit péteux que j'étais l'année dernière, ah mais c'est que moi maintenant je m'y connais un peu en parfums, c'est que moi je ne me laisse plus berner par ce qui est formaté pour plaire à la masse, moi je porte du vintage, du vieux Guerlain, du niche, du féminin, du complexe, du rare, s'il vous plait. Ma mauvaise foi, donc, avait largement dilué les premières impressions positives qui m'étaient venues à l'esprit. C'est vrai quoi, je ne suis pas né de la dernière sortie d'Escada, les parfums mainstreams qui sentent bon cinq minutes, le temps de passer en caisse, et qui ensuite n'ont plus d'âme, plus de poésie, plus rien, ils sont plats. Je ressens mon poignet, ah mais voilà, ah mais j'en étais sûr, ah mais quelle perte de temps, ah mais je m'en doutais. Petit sourire condescendant avant de monter sur les barres parallèles. Ce parfum sent la craie. Ca sent âcre et ça pique le nez. Oubliée, la douceur des notes de tête, CK one me montre enfin son visage perfide de parfum commercial. Humpf !

Trop de mauvaise foi, trop de mauvais karma ? Peut-être. J'ai fais une chute à la fin de mon mouvement, mauvaise sortie, fracture de la maléole, pourtant je ne me blesse jamais d'habitude... Rien de très grave (mais à deux semaines des premières compétitions c'était catastrophique). Allongé sur le tapis, je me suis rendu compte que ce que je sentais de si âcre, poussiéreux, crayeux...Ce n'était que la magnésie, dont je m'étais badigeonné les mains avant de monter sur les barres, et qui avait évidemment éclipsé CK one, un peu plus bas sur mon poignet (voila ce qui arrive lorsqu'on fait attention pour la première fois à ce que sent un gymnase ; ça m'apprendra à ne pas garder les narines en mode off !). Mais bon sang, je voulais tellement le détester, ce parfum...




Dans la salle d'attente des urgences, le lendemain, j'ai pris mon échantillon avec moi, complètement atterré par ma propre stupidité. Je me détestais moi-même, sur le coup, d'avoir autant d'idées préconçues, c'est un de mes gros défauts, mais j'y travaille, j'y travaille... Ainsi donc, fraichement douché, loin des odeurs âcres et poussiéreuses des tapis du Gymnase, j'ai pû apprécier CK one à sa juste valeur. J'avais l'impression d'être le héro d'un de ces contes scandinaves pour enfants, où un petit garçon fuit un loup blanc à travers les bois parce qu'on lui a toujours dit qu'ils étaient dangereux. Ce n'est que lorsque le petit garçon tombe et se blesse que le loup peut enfin le rattraper. Et que le petit garçon se rend compte que le loup blanc est inoffensif, en plus d'avoir un pelage splendide. Le pelage de mon loup blanc à moi sent adorablement bon le jasmin dans les notes de cœur, noyé dans un nuage de musc et réhaussé d'une petite note de thé vert, qui empêche le parfum de tourner en rond sur le thème de la lessive. CK one cadrait si bien avec l'odeur aseptisée qui règne, omniprésente, dans les hôpitaux, un peu dérangeante comme un ultrason, les blouses blanches, la lumière crue des halogènes, le lino... Que depuis je l'associe aux infirmiers (et maintenant que j'y pense, CK one peut faire un très bon parfum pour aller travailler). Mais bien au delà de ce premier souvenir, plus je sens CK one, et plus il m'évoque l'époque et l'état d'esprit de son lancement, à savoir la jeunesse simple, sage et décontractée des années 90.

Je revois les amis de mon frère, de dix ans mes ainés, quand ils avaient mon âge. Ces jeunes gens aux cheveux un peu longs, qui déchiraient leurs blue jeans au niveau des genoux, jouaient au basket après les cours, avaient des bagues gris acier aux dents et portaient des T-shirts unis. Buvaient de la cristalline et mangeaient des Prince de Lu au goûter. Leurs copines, très sages, qui papotaient, assises sur le trottoir un peu plus loin, se faisaient des tresses et y incorporaient des pâquerettes, romantiques. Pas de portable, pas de joint, pas d'alcool, moins de rires mais plus de sourires, moins rebelles, mais au fond, peut-être plus libres que la jeunesse d'aujourd'hui ? Ils rentraient peut-être au coucher du soleil, mais au moins ils rentraient tous ensemble.

La semaine dernière (c'est à dire exactement un an après ma blessure et mon premier test de CK one), je bullais devant une chaine musicale après avoir vidé les dernières gouttes de mon échantillon et je suis tombé sur un clip de Katy Perry qui reflète exactement les images que ce parfum m'évoque. Vous n'avez pas pu y échapper, à ce Teenage Dream, tube de l'automne 2010 ect, ect... Je n'avais encore jamais vu le clip et j'ai beaucoup aimé cette ambiance 90's de la mise en scène, premières vacances d'été entre amis, blue jeans, voitures, plage, bain de minuit sans la patience d'attendre minuit. C'est exactement ça, dans une variante un peu plus americanisée, quand même. Mais Calvin Klein est une marque américaine alors on ne va rien dire.




Que dire, que conclure, au final ? Une odeur agréable et signée, une excellente cohérence globale du lancement, un succès commercial qui ne faiblit pas en plus de dix ans de production...N'en jetez plus, que faut-il de plus pour élever un parfum au rang de classique, ou plutôt, de nouveau-classique ? Cette élite tout fraiche qui se dessine, et qui mérite cette distinction, ces Angel, Body Kouros, Amor Amor, Hugo Boss ..? Ces parfums sur lesquels on ne misait peut-être pas à leurs débuts, qui nous énervent peut-être intensément, car trop portés, car too much, parfois, mais qui dominent le marché... Ces parfums qui, derrière un aspect commercial toujours très assumé, sont en même temps incroyablement bien construits, et n'ont donc pas volé leur place au sommet !

vendredi 4 février 2011

Carnal Flower - Jungle Power


Dans la jungle humide et dans la moiteur de ce labyrinthe de nature vierge, je l'ai rencontrée. Sauvage. C'est l'impression initiale que donne Carnal Flower, quand on l'aborde pour la première fois. Cependant, l'approche en elle même de cet animal en voie d'extinction vaut le détour.

A la base, pas de safaris de prévu. Juste le plaisir d'errer dans cette jungle, antre humide du monde, où le temps n'est plus tel qu'il est. La jungle est le pays des sons. Le craquement d'une branche, le vent qui fouette quelques feuilles plus grandes que notre visage dans un murmure silencieux, la goutte qui perle au bout la large verdure de cette contrée. Chaque son est analysé par une oreille au pouvoir décuplé.

Mais la jungle est aussi le pays des odeurs. Celle un peu piquante des fleurs sauvages de couleurs prononcées, celle délicatement aquatique de la végétation humide, mais aussi celle légèrement sèche du bois protégé par la densité de la nature, celle délicatement fraîche et verte de ces feuilles que l'on fait crisser sous nos pieds.

Carnal Flower est une entité réelle de la jungle. Elle est l'animal, le végétal et le minéral de l'environnement inconnu dans lequel j'erre. Animale par sa vivacité, sa fougue et son aura d'être impalpable et pourtant bien présent. Car on ne rencontre, pour ainsi dire jamais Carnal Flower. Nous la sentons, la devinons, mais jamais elle n'apparaît devant nous.

Henri Rousseau, Tigre attaquant un buffle

Un bruit d'ailes qui s'envolent se fait entendre juste au-dessus de moi. Des feuilles proches d'un marron passé tombent à mes pieds, et je m'arrête. Le bruit naturel de la jungle s'est éteint. Plus de crissements, de sifflements ou de résonnances aquatiques. Une accalmie effrayante, qui me révèle en fait la profonde obscurité du lieu.

Je ne suis pas en sécurité. Des sortes d'yeux invisibles s'ouvrent dans l'obscurité soudaine de la jungle. De petits bruits comme si une cape frôlait le sol jonché de feuilles titanesques parviennent à mon oreille, et je décide de me sauver. Au début, je marchai vite à vrai dire, je ne courrai pas pour ne pas m'effrayer moi-même. Mais... les odeurs furent plus rapides ! La violence d'un coup dans le ventre, d'un autre à la tête et un dernier juste sous le nez, sans y rentrer, m'assomma. Je suis tombé, le visage dans la terre. Je ne bougeai plus, de peur d'être à nouveau assailli, mais en fait, je fus aidé.

La jungle est versatile. Carnal Flower aussi. Tantôt sauvage, elle est maintenant douce. Je relève ma tête en vitesse et observe alentour, cherchant désespérément cette créature finalement omniprésente. L'obscurité s'est atténuée. A vrai dire, je pense que la pluie commence à tomber.  Elle réveille à nouveau la nature : le bruit des petites gouttes qui se transforme en grosses perles d'eau, et qui finissent par tomber sur la terre, dans un chant d'odeurs, de sons et d'images somptueuses. J'ouvre un peu la bouche, et quelques gouttes de cette bruine blanche et fraîche me tombent sur la langue, réveillant un gout un peu amer, lacté et profondément humide dans toute ma bouche.

La bruine s'intensifie au fur, et devient une véritable pluie tropicale. La jungle si hostile au départ est devenue presque qu'accueillante. Des vapeurs semblent s'échapper du sol, des arbres, des lianes et des feuilles. Tout devient noyé dans cette brume inexplicable. Tout se fond.

Et dans un dernier souffle de vent, je sens une dernière fois le sillage de Carnal Flower dans l'air.